Les racines du ciel

Lena & the Floating Roots Orchestra / Live @ La cartonnerie (Reims)

Corinne Leborgne
Sextant (12/07)

La Cartonnerie, imposant cube de béton posé au bord de la voie ferrée rémoise accueillait en ce vendredi 7 décembre 2007 pluvieux, le quatrième projet composite de LENA (Mathias Delplanque), dont nous attendons que l’année 2008 lui ouvre les voies d’une belle reconnaissance.

Inaugurée lors d’une session fiévreuse remarquable, à l’issue d’une résidence au toujours entreprenant Olympic nantais, la nouvelle formation Lena and the Floating Roots Orchestra est vécue comme une expérience « acoustellaire », autour d’une figure source reconnue du dub expérimental, d’un noyau dur de musiciens de différents horizons et disciplines (Rob Mazurek, Steve Argüelles, Charles Eric Charlier, Rasim Biyikli, Charlie O, Black Sifichi) et d’invités ponctuels. Libre hydre à sept têtes, l’hybride au superlatif. Place aux métamorphoses.

Ce soir-là, la magie opère : sur le fil funambule de l’incantation hypnotique du master slammeur ténébreux Black Sifichi, les trames s’ourdissent de façon implacable, les ramifications piègent comme autant de sortilèges, les nappes se développent, se fondent, les intrusions sonores y ricochent, s’y incorporent en une pénétrante résonance qui emporte tout l’être.   Sur la ligne d’horizon électronique, chaque partenaire paraît habité par la concentration, dans un acte de correspondance collective sonore et rythmique, où chaque singularité d’univers - basse, batterie, orgue hammond - s’imbrique, s’intercale, coagule, fusionne. L’harmonie tribale frôle la transe.

Un live enveloppant comme une attraction étrange, un véritable spectacle immersif à l’imaginaire puissant où chaque pièce inocule des impressions décalantes.   Une heure de lévitation au milieu des sons et des pulsations, vagabondage intérieur aux confins de paysages réversibles et mutants, errances nocturnes, urbaines, cavales échevelées des esprits, chevaux vapeurs à tête de coq, westerns pour soi derrière son ombre.